mardi 10 mai 2016

Nouvelles élections et nouvel espoir dans l’état espagnol, par François Caussarieu, Pierre Marion, Richard Neuville et Francis Viguié




Les élections générales du 20 Décembre 2015 ont confirmé les données essentielles de la situation politique espagnole et, en particulier, la crise majeure du régime issue de la Transition de 1978 négociée après la mort de Franco.

Le bipartisme est fini ! Que ce soit le PP, parti de la droite postfranquiste, ou que ce soit le PSOE, aucun de ces partis n’a la majorité et le nombre de  députés suffisants pour constituer un gouvernement. Une époque est révolue, de nouveaux partis ont émergé comme Podemos ou Ciudadanos. La question des alliances est devenue centrale pour la constitution d’un gouvernement.


Le PSOE choisit une alliance à droite.

Le Roi a d’abord appelé le PP, parti arrivé en tête avec 27% des voix,  pour constituer un gouvernement. Celui-ci étant incapable de trouver des alliances et une majorité de députés, le Roi a ensuite appelé alors le PSOE arrivé deuxième.  Malgré la proposition de Podemos de constituer un gouvernement à la "valencienne" réunissant toute la gauche et le soutien ou l’abstention des courants nationalistes catalans ou basques …, le PSOE va construire une alliance avec un parti de droite Ciudadanos. Ce parti, en raison de sa courte existence, n’a pas les franquistes identifiés dans ses valises et n’a pas eu le temps de sombrer dans la corruption totale comme le PP, mais est un réel parti libéral de Droite dont la base constitutive est « l’unité de l’Espagne »[1]

Dans un deuxième temps, le PSOE a cherché l’abstention des députés de Podemos pour accéder au gouvernement. Que ce soit sur les politiques d’austérité ou sur le droit démocratique à décider à travers le referendum en Catalogne, l’accord PSOE – Ciudadanos rendait impossible tout accord avec la gauche. L'orientation de Podemos était alternative à celle du PSOE dans le sens où elle supposait la rupture avec Ciudadanos. Le PSOE, en refusant une coalition gouvernementale de gauche, porte l’entière responsabilité de l'échec et de retour aux élections

Nouvelles élections le 26 juin 2016.

Lélément nouveau pour ces nouvelles élections du Parlement, Las Cortes, est l’alliance Podemos avec IU. Lors des élections de décembre, cette alliance n’avait pas été possible. Podemos, dans un changement pragmatique de ligne comme nous en avons connu d’autres dans le passé récent (caste et PSOE, droit à l’autodétermination, contre la « soupe de sigles »), et IU ont  trouvé un accord politique avec visibilité des sigles et répartition des député-e-s selon les résultats obtenus le 20 décembre dernier. 

Cette alliance est un nouvel espoir pour toutes celles et ceux qui veulent en finir avec l’austérité et la Droite. Cette nouvelle alliance doit prendre garde à respecter les "Confluences" (alliance large en Catalogne, Galice et dans le pays valencien) et leurs revendications.

Les différents sondages donnent, avant même le début de campagne, autour de 25% des intentions de vote à cette nouvelle alliance, devant le PSOE qui baisse un peu à 20%. La donne change à gauche, le PSOE continue sa baisse et perd la main.

Nous ne pouvons qu’espérer que la dynamique unitaire à gauche alliée à la volonté d’en finir avec la droite bouleverse totalement le paysage politique. Si les sondages donnent 25% à cette alliance, ils donnent 27% au PP, ce qui n’est pas insurmontable. Le PP est gangrené par la corruption, éclaboussé par les scandales et de plus Rajoy, actuel chef du gouvernement, est contesté en interne.

La pire des situations pour le PSOE

Soyons optimistes, si les sondages ou même mieux encore, l’alliance Podemos – Confluences – IU arrive second voire premier, le PSOE va se retrouver dans une situation qui ne peut que le diviser durement et durablement. Nous sommes loin des négociations du premier tour et de l’accord avec Ciudadanos. 

En fonction de l'arithmétique parlementaire, soit, le PSOE accepte un accord avec l’alliance de gauche, mais cet accord ne peut se faire à ses conditions et pour les barons du PSOE, il est encore aujourd’hui impossible de penser un accord avec Podemos et d’accepter l’idée d’un referendum en Catalogne. Si cet accord se fait, il aura alors un prix interne sérieux.
Soit, le PSOE répondant aux sirènes de la Troïka et de certains de ses barons comme Felipe Gonzalez, et trouve un accord de gouvernement avec le PP et Ciudadanos ou s’abstient pour permettre la constitution de gouvernement et nous voyons bien la crise majeure qui s’ouvre.


Un nouvel espoir

L’état espagnol bouge à gauche. Déjà lors des élections de Décembre nous avons vu que les confluences arrivaient en tête avec 28% en Catalogne ou seconde en Galice avec 26%. C’est cette dynamique qui est porteuse d’espoir. Les sondages indiquent une attente forte, le fait que l’alliance Podemos-Confluences-IU soit majoritaire chez les moins de 55 ans en est un exemple. Le PP n’est plus majoritaire que chez les plus de 65 ans !

Ca bouge aussi à gauche du côté des partis, la proposition d’Ada Colau de construire un nouveau parti à partir de la Confluence En Comú est aujourd’hui acceptée par Podem (le représentant catalan de Podemos), ICV – EUiA (Izquierda Unida), Cataluna Si que es Pot… Un grand parti unitaire de gauche devient possible en Catalogne.

Au pays basque (communauté autonome et Navarre), si pour l’instant aucune convergence électorale n’est envisageable entre la gauche indépendantiste d’un côté, IU et Podemos de l’autre, Arnaldo Otegi, porte-parole de la coalition Bildu s’est dit prêt à soutenir un « gouvernement de progrès » qui sortiraient des urnes en juin, mettant dans la balance la question du droit à l’autodétermination, comme le font la gauche et l’extrême gauche catalanes.

Solidarité et mobilisation pour une victoire de la coalition de gauche le 26 Juin

Ces quelques semaines vont être importantes pour toutes celles et ceux qui cherchent un débouché politique à gauche. Un bon score et une dynamique enthousiasmante dépasseront sans problème les frontières et ne peuvent que trouver un écho avec le combat contre la loi El Khomri et les Nuits debout.

Notre solidarité est d’autant plus nécessaire qu’il faudrait être très naïf pour croire que l’Union européenne, la BCE et les fossoyeurs du peuple grec vont rester les bras croisés et spectateurs.

Nous apportons tout notre soutien à cette coalition, leurs espoirs sont les nôtres.

Le 9 Mai 2016.

François Caussarieu, Pierre Marion, Richard Neuville et Francis Viguié, membres de la commission État espagnol


[1] Ciudadanos est une formation politique « unioniste » créée en Catalogne en 2006 en opposition au nouveau statut d'autonomie. Albert Rivera en est  le leader depuis sa création.  En 2014, le parti a décidé de s'implanter à l'échelle nationale en dénonçant notamment la corruption.

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